Espèces & habitats

Note introductive.

1 L’habitat est un ensemble d’éléments du paysage constituant le milieu dans lequel s’opèrent des échanges d’énergie et de matière où les êtres vivants vont pouvoir vivre et se reproduire. Dans son fonctionnement l’habitat est un écosystème dynamique permettant à plusieurs espèces de coexister ou d’interagir.

La directive européenne dite « habitats » a pour objet le maintient ou le rétablissement dans un état de conservation favorable des habitats naturels et des espèces d’intérêt communautaire. Dans ce sens les Etats membres de l’Union européennes mettent en œuvre une politique visant à encourager la gestion d’éléments du paysage (rives, bosquets, haies, ….) dont l’importance est majeure pour la faune sauvage et la flore. La protection de certains habitats et l’extension des aires dites protégées font partie des outils possibles.

2Les zones spéciales de conservation (ZSC) qui regroupent les habitats de l’annexe I et les habitats des espèces de l’annexe II auxquelles s’ajoutent les zones de protection spéciale des oiseaux de la directive « oiseaux » constituent ensemble le réseau Natura 2000. Les mesures de gestion et de conservation permettant d’atteindre, sur ce réseau, les objectifs de cette directive doivent tenir compte des exigences économiques, sociales et culturelles ainsi que des particularités régionales et locales.

Les sites du réseau Natura 2000 n’excluent pas les activités humaines, mais certaines, dont la chasse, doivent faire l’objet d’une évaluation de leur incidence.

S’agissant des principes de perturbation/dérangement, il importe de rappeler ce que prévoient les textes réglementaires ainsi que l’interprétation qu’en fait la Commission européenne.

Pour la directive européenne « oiseaux » (l’espèce est inscrite à l’annexe 1):

Article 5.

Sans préjudice des articles 7 et 9, les états membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un régime général de protections de toutes les espèces d’oiseaux visées a l’article 1er et comportant notamment l’interdiction :

a) de les tuer ou de les capturer intentionnellement, quelle que soit la méthode employée;

b) de détruire ou d’endommager intentionnellement leurs nids et leurs œufs et d’enlever leurs nids;

c) de ramasser leurs œufs dans la nature et de les détenir, même vides ;

d) de les perturber intentionnellement, notamment durant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation ait un effet significatif eu égard aux objectifs de la présente directive ;

e) de détenir les oiseaux des espèces dont la chasse et la capture ne sont pas permises.

Pour la directive européenne « Habitats ».

Article 6.

2. Les États membres prennent les mesures appropriées pour éviter, dans les zones spéciales de conservation, la détérioration des habitats naturels et des habitats d’espèces ainsi que les perturbations touchant les espèces pour lesquelles les zones ont été désignées, pour autant que ces perturbations soient susceptibles d’avoir un effet significatifeu égard aux objectifs de la présente directive.

Selon le guide interprétatif de l’article 6 de la directive habitats (Commission européenne 2000)

« 3.4. Quelles conditions déclenchent les mesures à prendre par les États membres?

Il semble qu’il y ait une différence entre la limite d’acceptabilité en ce qui concerne la détérioration d’un habitat et la limite d’acceptabilité en ce qui concerne les perturbations subies par une espèce.

En ce qui concerne les perturbations, ces dernières doivent être significatives (un certain niveau de perturbation est donc toléré). En outre, il n’est pas nécessaire de prouver qu’il y aura des effets réels significatifs, mais la probabilité à elle seule («soient susceptibles») suffit à justifier des mesures correctives. » La probabilité ne concerne pas l’acte de dérangement ou de perturbation en tant que tel mais le fait que les perturbations ont un effet significatif portant atteinte à l’état de conservation des espèces.

« 3.5. Quand importe-t-il de prendre des mesures liées aux perturbations et à la détérioration?

Il importe tout d’abord de souligner que les mesures doivent être appropriées. Elles doivent donc être conformes à l’objectif principal de la directive par le fait qu’elles contribuent à maintenir l’état de conservation des habitats ou des espèces concernés tout en tenant compte «des exigences économiques, sociales et culturelles ainsi que des particularités régionales et locales». »

« 3.6.2. Les perturbations des espèces

À la différence des détériorations, les perturbations ne concernent pas directement les conditions physiques d’un site. Elles concernent les espèces et sont souvent limitées dans le temps (bruit, source de lumière, etc.). L’intensité, la durée et la fréquence de la répétition des perturbations sont donc d’importants paramètres.

Pour être significative, une perturbation doit avoir des effets sur l’état de conservation. L’état de conservation d’une espèce est défini à l’article 1er, point i) (voir point 2.3). »

3Selon le droit français et en application des directives européennes « oiseaux » et « habitats », voici dans quel cadre réglementaire doit être limité, non le dérangement, mais la perturbation sur les espèces animales.

En France, en application des articles L.411-1 et L.411-2 du code de l’environnement et par l’arrêté fixant la liste des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection.

L’article 3 stipule notamment que « I.- Sont interdits sur tout le territoire métropolitain et en tout temps : la destruction intentionnelle ou l’enlèvement des œufs et des nids ; la destruction, la mutilation intentionnelles, la capture ou l’enlèvement des oiseaux dans le milieu naturel ; la perturbation intentionnelle des oiseaux, notamment pendant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation remette en cause le bon accomplissement des cycles biologiques de l’espèce considérée.

Mais également L414-1 :

V.-Les sites Natura 2000 font l’objet de mesures destinées à conserver ou à rétablir dans un état favorable à leur maintien à long terme les habitats naturels et les populations des espèces de faune et de flore sauvages qui ont justifié leur délimitation. Les sites Natura 2000 font également l’objet de mesures de prévention appropriées pour éviter la détérioration de ces mêmes habitats naturels et les perturbations de nature à affecter de façon significative ces mêmes espèces.

Ces mesures sont définies en concertation notamment avec les collectivités territoriales intéressées et leurs groupements concernés ainsi qu’avec des représentants de propriétaires, exploitants et utilisateurs des terrains et espaces inclus dans le site.

Elles tiennent compte des exigences économiques, sociales, culturelles et de défense, ainsi que des particularités régionales et locales. Elles sont adaptées aux menaces spécifiques qui pèsent sur ces habitats naturels et sur ces espèces. Elles ne conduisent pas à interdire les activités humaines dès lors qu’elles n’ont pasd’effets significatifs sur le maintien ou le rétablissement dans un état de conservation favorable de ces habitats naturels et de ces espèces.

Récemment le Groupe des Experts sur les Oiseaux et leur Chasse (GEOC), placé auprès du Ministère de l’Ecologie, a rendu un avis sur la notion de dérangement et de « perturbation significative ». En résumé, bien que toute activité humaine est susceptible de déranger, toute activité humaine ne perturbe pas nécessairement. http://geoc.mnhn.fr/dossiers_2013.html

Quel rôle peut jouer l’ISNEA relativement à l’application des directives oiseaux et habitats ?

Au travers de son programme scientifique, l’ISNEA s’inscrit dans une démarche volontariste d’évaluer l’état de conservation des espèces et des habitats, de connaître les causes à l’origine des variations observées et de comprendre les mécanismes pouvant agir sur l’état de conservation. Les protocoles d’études que nous appliquons suivent rigoureusement les recommandations des institutions scientifiques. Nos experts scientifiques sont en permanence au fait de l’actualité scientifique. Ce travail nécessite des moyens et un investissement important des personnels départementaux. Des stages de formation sont régulièrement dispensés afin de former nos correspondants et ainsi assurer une qualité exemplaire des données collectées.

 M.B.