Publié le 27 juin 2013
Dans le cadre du développement de son programme scientifique, l’Institut Scientifique Nord-Est Atlantique a démarré un suivi des classes d’âge (individus de moins et plus d’un an) chez les trois espèces d’oies grises pouvant être chassées en France. Cette initiative, une première en France, est basée sur une démarche innovante auprès de tous les chasseurs volontaires qui ont la possibilité d’adresser par email une photographie des oies prélevées à la chasse. Il s’agit là d’une méthode simple, rapide, efficace et peu contraignante grâce aux nouvelles technologies numériques.
Pour cette première saison, une centaine de clichés nous sont parvenus, principalement de départements de la moitié Nord de la France (majorité du Nord/Pas-de-Calais et de Charente- Maritime). L’analyse des critères du plumage nous a permis de distinguer les deux classes d’âge.
Le graphique ci-dessous montre que chez les deux espèces, la part des individus de plus d’un an était majoritaire et correspondait entre 72 et 79% de l’effectif chez l’oie cendrée et l’oie rieuse respectivement. La part relative des classes d’âge ne différait pas significativement entre les deux espèces (p>0,60).
Alors que les prélèvements des oies cendrées en octobre/novembre étaient à plus de 80% constitués d’individus de plus d’un, la part relative était significativement différente (p<0,05) en décembre/janvier avec une proportion de près de 50% dans les deux classes d’âge. Cette différence pourrait s’expliquer par une migration différentielle, avec une prépondérance des immatures (de plus d’un an) en début de saison qui migreraient plus tôt que les groupes familiaux. En effet, les immatures (non reproducteurs) démarrent et achèvent leur mue avant les adultes reproducteurs qui, par ailleurs, ont tendance à caler leur migration sur celle des juvéniles. Ils arriveraient donc en France plus tardivement. Une autre hypothèse non exclusive, serait que les juvéniles soient proportionnellement davantage prélevés en début de saison, notamment à l’ouverture de la saison de chasse au Danemark et en Norvège. Par exemple, chez l’oie à bec court, une espèce en expansion, alors que la part des juvéniles dans la population naturelle en automne varie, selon les années, entre 5 et 25%, elle est entre 10 et 65% (soit 2 à 3 fois plus élevée) dans les prélèvements des chasseurs danois (Madsen 2010). Si ce même phénomène se produit pour d’autres espèces d’oies, on peut s’attendre à ce que mécaniquement la part des juvéniles soit alors également plus faible en début de saison lors de leur arrivée en France.
Chez les oies rieuses, durant les deux périodes de la saison, la part des individus de plus d’un an variait entre 68 et 82%. Elle était donc 2 à 4 fois supérieure à celle des juvéniles. A l’inverse des oies cendrées, les différences entre les deux périodes n’étaient pas significatives (p>0,66).
En conclusion, nous pouvons affirmer que cette première saison constitue un préalable au suivi pluriannuel de la démographie des populations d’oies. Bien entendu, cette initiative portée par l’ISNEA mérite impérativement d’être renforcée pour la prochaine saison de chasse. Nous comptons donc sur l’intérêt volontaire qu’une telle étude suscitera auprès du plus grand nombre de chasseurs de gibier d’eau.
Enfin nous tenons à remercier individuellement et très chaleureusement, tous les chasseurs qui, sur leur initiative personnelle ou encouragés par leur fédération départementale ou l’ANCGE, ont activement contribué à initier ce travail, qu’il convient maintenant de largement amplifier les saisons prochaines.